Ph., G.AdC
LA PIERRE
Le lieu prend le nom de la pierre
la pierre porte le nom de la montagne
à moitié chauve au loin
la pierre ne se voit pas
au-dedans de la pierre
sous elle
se cache une forme d’enfant
tenant bâton, oiseau, balle.
Je tire des histoires par la manche.
« Maintenant je n’appartiens
qu’au soleil ».
Moi aussi, comme toi, je
sais à présent :
« Il faut des ailes pour atteindre le proche »
Israël Eliraz, « La Pierre », Thabor, Editions Le Taillis Pré, Châtelineau (Hainaut, Belgique), 2002, page 85. Traduction de Laurent Schuman.
NOTICE BIO-BIBLIOGRAPHIQUE
Israël Eliraz est né à Jérusalem le 23 mars 1936. Poète, librettiste, dramaturge et critique littéraire, il est l’auteur de nombreux recueils de poésie, dont Promenades (éditions Le Nouveau Commerce, 1994), Miniatures Clemente (éditions Unes, Draguignan, 1997), Bouche déchirée (id., 1997, co-traduit de l’hébreu par Colette Salem et Bernard Noël), Petites Bêtes (La Chapelle-Chaussée, Dana, 1999, co-traduit de l'hébreu par Colette Salem et Bernard Noël), Petit carnet du Levant (éditions José Corti, Paris, 2001), Abeilles/Obstacles (éditions José Corti, Paris, 2002), Comment entrer dans la chambre où l’on est depuis toujours (éditions José Corti, Paris, 2003, co-traduit de l’hébreu par Bernard Noël et l’auteur), Porte rouge (Éditions Le Taillis Pré, 2004), Laisse-moi te parler comme à un cheval (éditions José Corti, 2005), Dehors (éditions José Corti, 2008) et Et tout ça pour dire ose (éditions José Corti, 2010). Eliraz a aussi écrit deux pièces de théâtre (Loin de la mer, loin de l’été, 1969 ; La Banane, 1970) et les livrets de six opéras du compositeur israélien Josef Tal. Israël Eliraz est mort à Jérusalem le 22 mars 2016.
oui, elle était enfant et elle aimait le soleil qui brillait aux éclats, et, elle se couchait sous le soleil d'été dans un grand pré et il y avait tous les éclats du soleil qui entraient dans ses yeux, et, il y avait tant de lumière, et, elle était enfant et elle jouait avec le soleil et la lumière comme d'autres enfants jouaient à la balle ou à autre chose, et, elle aimait le soleil et la lumière, et, un jour elle a cru que le soleil lui avait menti parce que les êtres humains l'avaient trahie.
clem.
Rédigé par : clem | 22 juillet 2005 à 21:53
Oui, clem., un jour elle a su que le soleil lui avait menti. Elle a compris, dès la lumière du matin, que les humains l’avaient trahie. Qu’il serait difficile pour elle de jouer à nouveau dans les éclats de lumière. De cette trahison-là, elle a mis du temps à se guérir. Peut-être même que, guérie elle ne l’était pas tout à fait encore. Elle sentait encore sur sa peau couleur de pain chaud, les brûlures de ses déceptions, de ses chagrins. Pourtant, elle avait du mal à se résoudre, à se résigner. Elle n’était pas, comme les femmes de sa lignée, enfermée dans le silence. Elle osait proclamer encore que les éclats de la lumière d’été pouvaient à nouveau nourrir ses rêves d’enfant. Mais pas seulement les éclats de lumière, les éclats de mots aussi, avec leur magie. Et derrière cette magie, celle plus grande encore, plus incroyable, plus exaltante de tous les pourvoyeurs de mots. C’est pour cela qu’elle aimait tant Icare, et sa folie lui était un exemple. Tant pis si elle devait encore se brûler les ailes. Elle préférait tenter à nouveau de rejoindre le soleil et s’enivrer avec ceux qui voulaient la suivre, s'enivrer de ses éclats de beauté qui n’ont de rivaux que ceux de la poésie.
Rédigé par : Angèle | 23 juillet 2005 à 16:43
En réponse à "il faut des ailes pour atteindre le proche" ces 4 vers inestimables d'Emily Dickinson :
"Ne juge pas si lointain ce qui peut s'atteindre
Rien que le couchant t'en sépare
Ni si proche ce qui, voisin,
Est plus loin que le soleil".
Rédigé par : Florence Trocmé | 24 juillet 2005 à 13:57
Merci Angèle pour cette nouvelle note. Il y a en ce moment ce beau festival de Lodève, sur la poésie de la Méditerranée. On aimerait y être, ou entendre ce qui s'y lit, s'y dit.
Je lis en ce moment des poèmes d'Al Berto, poète portugais mort il y a quelques années, très bien édité à l'Escampette, sombre et tourmenté, mais attachant.
amitiés
Rédigé par : jacques | 25 juillet 2005 à 18:56
elle avait attendu Angèle sur sa terre natale, et, Angèle n'était pas là, elle avait marché dans les ruelles et elle avait vu le joli moulin à huile d'olive et elle avait vu le tilleul en haut d'une maison en pierre, et, elle avait quitté ce chemin et, elle marchait, et elle sentait la présence d'Angèle, Angèle qui aimait les poètes, qui vivait de la poésie comme d'autres vivent d'espoirs et si tout se ressemblait l'espoir et la poésie et elle marchait encore sur la terre natale d'Angèle et elle a vu la crique là-bas et Angèle lui dira le nom de la crique, oui, c'est certain, Angèle lui dira le nom de la crique, et, elle est repartie avec une émotion nouvelle dans son coeur, en se disant que la terre natale d'Angèle était aussi belle que sa terre natale qui n'était pas si loin, puisque sa terre natale c'était la Corrèze mais en Corrèze il n'y avait pas la mer, il n'y avait jamais eu la mer..
clem.
Rédigé par : clem | 25 juillet 2005 à 20:35
Excellente initiative, Jacques, que celle de mentionner le festival de poésie de Lodève. J'en profite pour renvoyer au site "Voix de la Méditerranée".
Rédigé par : Angèle | 27 juillet 2005 à 02:35
Lu à l'instant dans La Lettre José Corti n° 41 la sortie du recueil Laisse-moi te parler comme à un cheval.
Rédigé par : Webmestre de Terres de femmes | 23 novembre 2005 à 16:54
Il est encore possible d'écouter l'émission Poésie sur parole... diffusée hier soir (5 février) à l'occasion de la sortie chez José Corti de Laisse-moi te parler comme à un cheval.
Rédigé par : Webmestre de TdF | 06 février 2006 à 21:17