Ph., G.AdC JE T'AIME « Je t’aime pour toutes les femmes que je n’ai pas connues Je t’aime pour tous les temps où je n’ai pas vécu Pour l’odeur du grand large et l’odeur du pain chaud Pour la neige qui fond pour les premières fleurs Pour les animaux purs que l’homme n’effraie pas Je t’aime pour aimer Je t’aime pour toutes les femmes que je n’aime pas Qui me reflète sinon toi-même je me vois si peu Sans toi je ne vois rien qu’une étendue déserte Entre autrefois et aujourd’hui Il y a toutes ces morts que j’ai franchies sur la paille Je n’ai pas pu percer le mur de mon miroir Il m’a fallu apprendre mot par mot la vie Comme on oublie Je t’aime pour ta sagesse qui n’est pas la mienne Pour la santé Je t’aime contre tout ce qui n’est qu’illusion Pour ce coeur immortel que je ne détiens pas Tu crois être le doute et tu n’es que raison Tu es le grand soleil qui me monte à la tête Quand je suis sûr de moi. » Paul Éluard, Le Phénix, Œuvres complètes, II, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1968, page 439. Les poèmes du Phénix font partie de la collection Dominique Éluard. Ils ont été repris dans le recueil posthume Derniers poèmes d'amour en 1962. |
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Moi qui ne sais jamais dire pourquoi j'aime:) Il faudra revenir sur nos classiques et dire: je l'aime parce que c'est lui, ou elle
Rédigé par : JC-Milan | 05 mai 2005 à 22:11
Plutôt que de revenir à Montaigne et La Boétie (pour reprendre la citation à laquelle tu fais allusion), on pourrait plus simplement en revenir au mythe amoureux, à Adam et Eve pour ne citer que l'exergue du recueil d'Eluard (un "classique" dont l'oeuvre n'a pas encore été vraiment découverte d'ailleurs) : "Le Phénix, c'est le couple - Adam et Eve - qui est et n'est pas le premier."
"Comprenne qui voudra !" comme le dit par ailleurs Eluard, et comme le dit en son temps Georges Pompidou après le suicide de Gabrielle Russier, morte d'avoir trop aimé :
"Moi, mon remords, ce fut
la victime raisonnable
au regard d'enfant perdue,
celle qui ressemble aux morts
qui sont morts pour être aimés."
Rédigé par : Yves | 05 mai 2005 à 22:51
Encore que la relation qui liait Montaigne à La Boétie et La Boétie à Montaigne s'apparente davantage à une relation amoureuse qu'à une simple amitié. Et le discours à un discours amoureux. Qui renvoie donc bien au mythe initial (Denis de Rougemont, ça te rappelle quelque chose ?? :).
Quant à Eluard, ses poèmes ont déserté ces dernières années les manuels scolaires et les programmes d'agrég depuis que la trinité Char/Michaux/Ponge domine le débat universitaire branché. Le poète n'a plus le vent en poupe (sauf quand il écrit avec Char. Cf. Ralentir Travaux, relancé par Corti), alors qu'il a écrit les plus beaux vers de la lyrique amoureuse. Probablement, parce qu'il est la mauvaise conscience de l'intelligentsia française en raison de son engagement au PCF. La poésie est hélas, elle aussi, question de mode! Heureusement le phénix renaît toujours de ses cendres. Alors patience ! Peut-être verrons-nous refleurir un jour, sur les cahiers d'écoliers, "Liberté j'écris ton nom".
Rédigé par : Angèle Paoli | 06 mai 2005 à 00:00
Je partage entièrement votre avis JC Milan. Je t'aime c'est beau, tendre, léger, clair comme l'eau vive. Chargé de sens ou insensé. Je t'aime dit amitié, amour, tendresse, passion, il dit de multiples rencontres et des trésors cachés. l'extrême simplicité pour dire la complexité d'une vie posée dans quelques lettres.
Vous parliez chère AngèlePaoli d'amour entre la Boétie et Montaigne, mais est ce que l'amitié n'est pas un autre nom pour l'amour?
Je t'aime pour tout et rien, pour toi et moi, pour eux un peu, pour l'éternité ou pour un instant.
Rédigé par : hecate | 10 mai 2005 à 15:39
Chère Hécate, je ne crois pas pour ma part qu’amour et amitié soient réellement de même nature. Il est vrai que ces deux mots ont un air de parenté. Mais ce sont de faux amis. C’est sans doute leur proximité phonétique qui fait que nous les mettons sur le même plan linguistique. De cette proximité phonétique nous en avons conclu de longue date une proximité affective. Pourtant leur étymologie les sépare. Et par leur racine, ils n’appartiennent nullement à la même communauté familiale. Ce sont nos littératures lointaines qui les ont fait se rencontrer et parfois se fondre l’un dans l’autre. Je parle de la « fine amor » cultivée par gentes dames et troubadours. Qui ont, par leurs mœurs très raffinées, contribué au polissage des rudes chevaliers, peu enclins à se livrer aux subtiles combinaisons de l’amour courtois.
Aujourd’hui, même si la tendance est au métissage des genres, les acceptions de ces deux mots se sont disjointes, puisque la connotation érotique n’est plus attestée dans le mot amitié (comme elle a pu l’être jusqu’au XVIIIe siècle), à l’exception de l’expression « amitiés particulières ».
Sans doute rêvons-nous, au-delà des apparences, d’une certaine simplicité, celle dont parle Giulia et que vous partagez aussi. C’est un peu une boutade, cette formule de Montaigne. L’auteur s’abrite derrière cette équation pour ne pas avoir à s’interroger et à s’expliquer sur la complexité des sentiments qui le lient à son ami. Alors même que le projet de ses Essais était de se peindre tel qu’il était. Et de rendre compte au plus près des fluctuations de son cœur et de son esprit.
Et puis, comme nous le savons tous, entre la réalité à laquelle nous aspirons et les mots que nous employons pour tenter d’en rendre compte, il y a, hélas, bien des écarts et bien des malentendus. Je ne crois pas que l’amour puisse être résolu en des termes simples tout simplement parce que l’amour est le sentiment le plus difficile à définir et à vivre. Quant à la passion amoureuse, elle relève pour moi d’une forme de folie à laquelle j’adhère totalement, que j’appelle de tous mes vœux, même si elle doit m’entraîner dans les pires souffrances. L’amitié a pour moi les douceurs de l’ennui. Et je me lasse très vite de ces demi-teintes. Il me faut des alcools forts, sans lesquels je dépéris et m’étiole comme une pauvre fleur que délaisse une lumière vive qui se déroberait à ses désirs.
Rédigé par : Angèle | 11 mai 2005 à 22:58
A quoi ça sert l’amour __________
"...L'amour ça sert à quoi ?
A nous donner d' la joie
Avec des larmes aux yeux...
C'est triste et merveilleux !"
- Edith Piaf-
"Offrir l'amitié à qui veut l'amour, c'est donner du pain à qui meurt de soif."
- Proverbe espagnol-
Amicizia
Guidu _________________
Rédigé par : Guidu | 12 mai 2005 à 09:48
Je t'aime sont les mots les plus durs à dire, pourtant, une fois dits, ils sont inlassables.
Un je t'aime qui vient du coeur est simplement plus pur que tout autre geste ou parole que l'on peut poser.
Rédigé par : Zoé | 23 avril 2010 à 04:48