ENFER ET RÉDEMPTION
« À l'époque, si je me souviens bien, je décrivais le monde comme un théâtre où auraient dansé, au bal macabre des pulsions, des théories de cadavres. Contemption et vocifération ne m'empêchaient pourtant pas de traquer la décomposition de valse en valse amoureuse. Nuits alanguies à dériver au gré de scansions syncopées, pulsations brèves; la voie de l'enfer s'étoilait de sourdes lanternes; un fond d'abîme se rapprochait indéfiniment; aux parois lisses du tourbillon dans lequel je me mouvais, je discernais les images déformées de corps extatiques, dans le râle lent et rauque des tortures de la chair à vif. Mais je glissais et ne pouvais m'éprendre, m'interrompre et faillir à mon destin de fuite fascinée. Était-ce vraiment une imposture que d'aller nier la grâce là où je ne pouvais pas croire qu'elle ne résidât pas? Était-ce une hérésie de soutenir que la lucide traversée de l'enfer est voie directe de rédemption ? « Tu ne me chercherais pas si tu ne m'avais pas trouvé; tu ne me désirerais pas si tu ne m'avais pas un jour tenu dans tes bras. »
Anne F. Garréta, Sphinx, éd. Grasset & Fasquelle, 1986, page 9.
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