Chroniques de femmes
BARBIE GIRL *
Restons quelques instants « entre femmes » et laissez-moi vous parler de l'une d'entre elles.
Barbie Surfer Girl
Source : Allô Mattel
Née en 1959, Barbara Millicent Roberts est sans doute l'une des femmes les plus célèbres au monde. Et pourtant, je suis sûre que ce nom ne vous dit pas grand-chose.
En 1956, pendant un séjour en Suisse, Ruth et Elliott Handler découvrent Lilli Bild, reproduction d'une héroïne de bande dessinée allemande. Fabriquée par la firme Hauser sous la forme d'une petite poupée. Enchantés par le produit, les Handler laissent à leur idée le temps de mûrir. Et c'est à la Foire du Jouet de New York, en 1959, que le couple fondateur de Mattel présente au grand public la poupée Barbara (le prénom de leur fille), surnommée Barbie. Vite suivie par Ken, en 1961, dont le slip - pour la petite histoire - restera inamovible. C'est qu'on ne plaisante pas avec les bonnes mœurs. Suivent de folles journées de surf, de tennis, de skate-board, d'aérobic… jamais de galipettes. Barbie a pourtant appris à ouvrir les yeux et plier les genoux en 1964 : une prouesse !
Barbie devient un mythe. Faisant la « une » des plus grands magazines, animant les rêves des petites filles et remplissant les caisses des fabricants d'images autocollantes à échanger. Depuis toujours, les plus grands se sont penchés sur la garde-robe de la top platinée : Ungaro, Gucci, Rykiel, Versace, Chanel, Balenciaga, Cacharel, Dior, Naf Naf, Benetton ou Andy Warhol. À la naissance de « sa » fille Barbie, Ruth Handler ne jurait que par les tenues vestimentaires de Jackie Kennedy. Tailleurs et fourrures devaient être de la meilleure qualité pour sa poupée fétiche. Les collectionneurs en sont fous. Nos portefeuilles un peu moins.
Chaque seconde, deux Barbie sont vendues dans le monde. Mattel affirme que 100% des fillettes américaines âgées de 3 à 10 ans en possèdent au moins une (96% en France, 99% en Italie et 95% en Grande-Bretagne). Plus d'un milliard de Barbie depuis sa création, près de 115 millions de mètres carrés de tissu utilisés pour habiller l'héroïne et ses copines depuis son arrivée sur Terre. Barbie peut tout faire, c'est une femme extraordinaire. Elle défile comme mannequin, déambule dans la vie sur des rollers, se transforme en Marine's, en docteur, en pompier, en vétérinaire (Barbie possède une quarantaine d'animaux, dont un dauphin et un bébé lion), en cosmonaute et même en Présidente des États-Unis. Rien que ça.
Les détracteurs sont pourtant légion. Jouet sans rôle éducatif scolaire ou social, femme dépensière aux mensurations utopiques (99-48-84), obsédée par son physique et la couleur de son rouge à lèvres, manque total d'intelligence et une philosophie de vie imbattable: le bonheur s'acquiert en l'achetant. Vive la société de consommation ! Des histoires de filles portées sur le fric et les fringues. Shelly, la petite sœur, est le seul bébé au monde à aimer le shopping ou à être déjà coiffée comme une hôtesse de l'air. Ken est le type le plus viril avec des costumes à rayures d'un autre temps et des chemises en pointe. Francie, l'amie black dont les traits sont aussi fins et réguliers que ceux de la blonde pulpeuse, n'aurait été créée que pour faire taire les ligues anti-racisme.
La critique assassine. « Pourquoi la Barbie divorcée coûte-t-elle plus cher? » « Parce qu'avec elle, vous recevez aussi la maison, le yacht et l'auto de Ken ». Et puis Barbie parle. Si, si. Vous voulez connaître ses premiers mots? « Que vais-je mettre pour aller au bal? », « Veux-tu aller faire du shopping? » ou « Les cours de maths sont difficiles ». Les féministes hurlent. Les autres aussi. De la moquerie à la parodie, il n'y a qu'un pas, mais Mattel ne rigole pas. Les contrefacteurs l'apprennent à leurs dépens.
La firme prévoit une chirurgie esthétique de son enfant-fétiche tous les sept ans. En 1998, la pauvre voit sa poitrine diminuée, sa taille arrondie, ses lèvres amincies et son regard démaquillé. Qu'à cela ne tienne. Pour compenser, jeans, baskets, piercing et véritable téléphone portable remettent la belle au goût du jour. Ken a désormais un copain homosexuel et des poupées de type afro-américain sont mises en vente sur le marché. Sans véritable engouement, il faut le reconnaître.
Allez, ne jetons pas trop la pierre, on a toutes eu un jour ou l'autre une Barbie entre les mains. Et rares sont celles qui n'ont pas aimé cela.
Marielle Lefébure
D.R. Texte Mariellle Lefébure
* Titre d'une chanson du groupe Aqua, figurant sur l'album Aquarium (1997)
Voir aussi : - (sur Terres de femmes) Chronique (II). |
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