Bernardo Strozzi,
Joueuse de viole de gambe, vers 1635.
Huile sur toile, Gemäldegalerie, Dresde.
Portrait généralement considéré comme celui de Barbara Strozzi.
Source:
Site Barbara Strozzi. LE site de référence.
« Udite amanti la cagione, oh Dio !
Ch'a lagrimar mi porta :
Nell’adorato e bello idolo mio,
Che si fido credei, la fede
è morta.
Vaghezza ho sol di piangere,
Mi pasco sol di lagrime
Il duolo è mia delizia
E son miei gioie i gemiti.
Ogni martire aggradami
Ogni dolor dilettami,
I singulti mi sanano,
I sospir mi consolano.
Ma se la fede negami
Quell’ incostante e perfido,
almen fede serbatemi
Sino alla morte,
O lagrime !
Ogni tristezza assalgami,
Ogni cordoglio eternisi,
Tanto ogni male affligami
Che m’uccida e sotterrimi. »
TRADUCTION :
« Écoutez, amants, la raison, O Dieu !
Qui me pousse à pleurer :
La confiance que je portais
en mon bel amour tant adoré
Est morte.
Pleurer est mon seul passe-temps
Les larmes sont ma seule nourriture
Et la douleur, mon seul plaisir,
Et mes joies ne sont que soupirs.
Tout martyre me plaît
Toute douleur me divertit,
Me soigne
Les soupirs me consolent.
Mais sa fidélité mon inconstante et perfide amie
Dénigre la force de mon amour
Du moins servez-moi fidèlement
Jusqu’à la mort !
O larmes
Que la tristesse m’assaille.
Que la douleur soit éternelle
Que le mal m’afflige
Qu’elle me tue et m’enterre. »
Le texte de ce lamento est repris d’un disque d'Arie, Cantate e Lamenti de Barbara Strozzi (disque cpo [Classic Produktion Osnabrück]. 999 533-2 Mona Spägele, soprano. Ensemble Incantato, juin 1998).
Pour entendre ce lamento dans son intégralité (7 min 35'), cliquer ICI [RealPlayer]. On pourra entendre (toujours dans L'Eraclito amoroso) la voix d'Agnès Mellon, une très grande voix du baroque, dans un concert (proprement « miraculeux ») donné à Marcq-en-Baroeul (banlieue lilloise) le 24 janvier 2001, dans le cadre du 12e Festival Mozart de Lille. Autre interprétation par l'Ensemble Poïésis sur deezer.com.
BIOGRAPHIE
Barbara Strozzi (Venise, 1619 - Padoue, 1677), fille de la courtisane Isabella Garzoni et du musicien Giulio Strozzi (1583-1652), constitue une belle exception musicale dans l’Italie du Seicento. Tout d’abord parce que, avec Francesca Caccini, elle est une des rares femmes compositrices (elle évoque à cet égard - dans le domaine pictural - Artemisia Gentileschi). Ensuite parce qu’elle a été d’une fécondité musicale exceptionnelle : en l’espace de vingt ans (1644-1664), elle a fait imprimer huit volumineux recueils de musique profane et sacrée. Cette composition du lamento de L’Eraclito amoroso s’inspire pour partie du modèle de la passacaille.
Texte très féminin, très mélancolique. Quel plaisir dans la douleur de l'abandon et de l'attente... Avec des rythmes faciles en italien, presque de chanson ou d'opéra.
Rédigé par : JC-Milan | 26 mars 2005 à 10:35
« La larme est à la musique ce que la ponctuation est à l'écriture. En lui donnant l'invisibilité de ses silences, elle lui offre les points d'appui de l'inaudible. »
Jean-Loup Charvet, L’Éloquence des larmes, Desclée de Brouwer, 2000, page 68.
Cet ouvrage est le testament de Jean-Loup Charvet, un haute-contre et historien de l'art. Ancien élève de James Bowman et ancien pensionnaire à la Villa Médicis, il est mort le 25 mai 1998, à l'âge de trente-sept ans.
Rédigé par : Angèle Paoli | 26 mars 2005 à 10:56
Cette petite citation de Barthes pour l’anniversaire de sa mort :
« Les yeux sont par nature de la lumière offerte à l'ombre, ternis par sa prison, ennuagés par des larmes. L'état parfait du tenebroso racinien, ce sont des yeux en larmes et levés vers le ciel [...] non seulement la lumière s'y purifie d'eau, perd de son éclat, s'étale, devient nappe heureuse, mais le mouvement ascensionnel lui-même indique peut-être moins une sublimation, qu'un souvenir, celui de la terre, de l'obscurité dont ces yeux sont partis : c'est un mouvement qui est saisi dans son entretien même. »
Roland Barthes, Sur Racine, Éditions du Seuil, collection « Points », page 19.
Bon, pour vous changer les idées, je vous suggère maintenant un petit strip-tease sonore. Sur Arte évidemment.
Rédigé par : Critias | 26 mars 2005 à 15:51
Il paraît si peu croyable qu'il puisse avoir existé une grande compositrice femme au Seicento que même la Fnac n'a pu y croire. La preuve ? Rendez-vous à l'adresse suivante. L'admirable disque de cantates de Barbara Strozzi, interprétées par la grande Judith Nelson, a été attribué à Gregorio Strozzi. Ce disque comprend d'ailleurs une célèbre cantate de l'op.8, L'Astratto, que le hasard peut vous conduire à écouter sur le Web. Elle est interpétée par Constance Cook, dans le cadre d'un concert live donné en décembre 2003. Ne vous faites pas une idée de Barbara Strozzi à partir de cette interprétation. Proprement catastrophique. Tout y est faux de bout en bout, et dans tous les sens du terme. Bon, un conseil d'ami, procurez-vous le disque de Nelson (elle est accompagnée au clavecin par William Christie et au violoncelle par Christopher Coin. Je vous mets un extrait de 30s). C'est proprement divin, et Dieu sait que le divin n'est pas toujours ma tasse de thé. Et ensuite, dites à vos ami(e)s que Barbara Strozzi existe bien. Parce que vous l'avez rencontrée.
Rédigé par : Yves | 16 novembre 2005 à 19:17
Merci à toi, Yves. A signaler aussi Per un bacio che rubbai, dans un disque sorti en mars dernier. Et dans une époustouflante interprétation de la soprano Marta Almajano.
Rédigé par : Angèle Paoli | 16 novembre 2005 à 22:40
Un autre lamento de Barbara Strozzi : Lagrime mie rencontré sur la Toile. Texte de Pietro Dolfino. Cliquer sur ce lien pour une écoute en RealAudio.
Lagrime mie, à che vi trattenete?
Perchè non isfogate il fier dolore
che mi foglie 'l respiro e opprime il core?
Lidia che tant'adoro,
perch'un guardo pietoso, ahi, mo donò
il paterno rigor l'impriggionò.
Tra due mura rinchiusa
sta la bella innocente
dove giunger non può raggio di sole;
e quel che più mi duole
ed accresc'al mio mal tormenti e pene,
è che per mia cagione
provi male il mio bene.
E voi, luni dolenti, non piangete?
Lagrime mie, à che vi trattenete?
Lidia, ahimè, vedo mancarmi
l'idol mio che tanto adoro;
sta colei tra duri marmi,
per cui spiro e pur non moro.
Se la morte m'è gradita,
hor che son privo di speme,
deh, toglietemi la vita,
ve ne prego, aspre mie pene.
Ma ben m'accorgo
che per tormentarmi maggiormente
la sorte mi niega anco la morte.
Se dunque è vero, o Dio,
che sol del pianto mio
il rio destino ha sete;
lagrime mie, à che vi trattenete?
Rédigé par : Yves | 13 décembre 2006 à 23:55
En recherchant de la documentation sur Barbara STROZZI, je me retrouve sur ce blog où j'avais déjà "sévi" (?) pour DE CHIRICO... vraiment BRAVO ANGELE pour ce blog très "culturellement authentique! "
deluol (genest)
Rédigé par : deluol dit genest | 22 mars 2008 à 19:02