Ph, G.AdC
Elle se souvient de ce jour-là
elle lui a dit « Parlez-moi du désert »
là où elle est elle est à mille lieues du désert
il y a les onze coups qui sonnent à la cathédrale
il y a le pépiement régulier de l'oiseau qui habite le parc
il y a la frondaison lumineuse du chêne qui se balance sous la brise
il y a les candidats penchés sur leurs feuilles
il y a la tapisserie surannée déchirée par pans entiers
il y a elle qui écrit pour elle
il y a elle là-bas vers le nord
qui lui murmure à l’oreille
« Parlez-moi du désert »
il y a la page jaune et elle
qui ferme un instant les yeux
il y a la vaste étendue désertique jusque là inviolée vierge de signes
les mots qui roulent sous sa plume par vagues comme les vagues du désert mêmes ondulations bleues sur fond jaune
jaune doré sur le fond bleu du ciel
Déserts déserts de pierres concassées immensités que nulle vie apparente n’habite si ce n’est le scarabée minuscule qui roule sa bouse en faisant se déplacer plus minuscules encore les grains de sable en traînée de poudre fine légère ténue silencieuse têtue un trait à peine une ridule qui disparaît bientôt comme bue par une onde plus large de sable
Déserts de dunes vastes étendues courbes
ondulatoires que l’œil cherche en vain à cerner circonscrire enclore dans un cercle fini de lignes horizon insatiable inaliénables espaces que nul ne peut dompter déserts mouvants infinis ondoiements de lune sculptés par les poussées du vent tourbillons imprévus qui balaient en rafales les parois illusoirement souples des sables
Déserts de dunes immenses qui jaillissent pareilles à des montagnes amples vagues de cristaux menus
rassemblées là
par quelle tempête mamelons millénaires et pourtant fugaces murailles claires dorées douces à l'œil enchevêtrements silencieux de sillons d’arêtes réseaux de lignes courbes croisement de crêtes milliards de milliards de grains infiniment petits
rassemblés là
par quel hasard faisceaux de poussières fines qui se déplacent par insensible reptation colonnes tourbillonnantes qui grimpent à l’assaut du ciel
chaleur implacable qui fige le sable dans l’infini du silence.
Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli
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je viens de parcourir votre site avec un plaisir non dissimulé...
Rédigé par : ludecrit | 27 mai 2005 à 12:26
Une belle http://voyages.liberation.fr/grandes-destinations/neiges-berberes>carte postale d'hiver.
Amicizia
Guidu___
Rédigé par : Guidu | 15 décembre 2008 à 00:50
"Elle appartenait à la rude densité du ciel, aux impitoyables étendues de sable. Au vent. Elle allait enfin apprendre à s'appartenir...
Insensiblement le fennec s'était rapproché. Elle ne l'en dissuada pas. Ils s'observaient silencieusement, sans penser à rien d'autre qu'à s'imprégner l'un de l'autre des parfums de la nuit...
Qui était-elle ?
D'où venait-elle ?
Où allait-elle ?
Quel était son nom ?"
Angèle Paoli, Lalla ou le chant des sables, Editions Terres de femmes, 2008.
Rédigé par : Christiane | 15 décembre 2008 à 10:13
Le désert, mon éternelle tentation! Merci de m'y entraîner encore et encore. Peut-être y retournerai-je un prochain jour. En attendant, il continue de déposer en moi les sédiments de ma mémoire. Et je m'y rends, chaque fois que le monde me pèse. Renouer avec le sable, la marche dure et difficile, et les "gens des nuages". Mais le maquis et la mer sont là, qui m'apportent d'autres réponses.
Rédigé par : Angèle | 15 décembre 2008 à 19:26