Portrait d'Anna Toscano
Image, G.AdC
Ci-dessous, la traduction que je propose du poème Venezia, de la poète et photographe vénitienne Anna Toscano. Poème que Guidu Antonietti di Cinarca m’a fait parvenir en version originale le 6 janvier, en commentaire sur Terres de femmes. Aucun poème d’Anna Toscano n'est à ce jour disponible chez un éditeur français, mais ma traduction est actuellement en ligne sur le site de l'éditeur italien LietoColle.
Angèle Paoli
VENISE
(À Mirella)
Venise
limpide et glacée
se met en scène
immuable et sans hâte
se consume
comme les forfaits
qui gisent au foyer
du cœur
mais le gel de ce jour
fige les lézardes
sans que le sang
s’épanche
par chance
quelle chance
d’avoir un cœur
qui saigne
dans le silence
d’hiver
D.R. Traduction Angèle Paoli
VENEZIA
(A Mirella)
Venezia
limpida e ghiacciata
scenografia di se stessa
immutabile senza fretta
si consuma
come i delitti
che giacciono al centro
del cuore
ma il gelo di oggi
blocca le crepe
e il sangue
non fuoriesce
per fortuna
che fortuna
avere un cuore
che sanguina
in silenzio
d'inverno.
Anna Toscano, Controsole, Como, LietoColle, Collana I quaderni di Lietocolle, 2004, page 29. Préface d'Ivano Malcotti.
BIOGRAPHIE
Née le 12 octobre 1970, Anna Toscano vit depuis de longues années à Venise, sa ville de prédilection. Docteur ès lettres, elle a soutenu une thèse sur le poète Attilio Bertolucci. Photographe professionnelle, elle expose régulièrement ses photos dans les plus grandes galeries italiennes : Altrove (photographies 1992-2002, Osteria da Muscoli, Trévise, mai 2002), Sguardi segreti sul mondo (Galerie Bianca Arte, Milan, octobre 2004) et collabore également à plusieurs revues d’art et de poésie italiennes.
En 2004, elle a publié tour à tour (mars et septembre) chez l’éditeur LietoColle le recueil de poésies Controsole , puis (en collaboration avec Ivano Malcotti) Il segreto delle fragole, journal de poésie 2005, où sont subtilement compilés 85 textes inédits de jeunes auteurs ou d'écrivains confirmés (parmi lesquels Sibilla Aleramo, Elisa Biagini, Anna Maria Carpi, Patrizia Cavalli, Leo Ferré, Alda Merini, Fernanda Romagnoli, Luis Sepulveda, Annie Vivanti et Andrea Zanzotto).
En 2012, Anna Toscano a publié un nouveau recueil aux éditions La Vita Felice (Milan) : Doso la polvere, avec une préface d’Anna Maria Carpi.
ANNA TOSCANO Ph. © Dino Ignani Source ■ Anna Toscano sur Terres de femmes ▼ → Anna Toscano ou De l'art de la fragmentation ■ Voir aussi ▼ → (sur Eventi magazine) une interview d'Anna Toscano par Roberto Ranieri → (sur LietoColle) « Luci e ombre nella poesia di Anna Toscano » par Erminia Passannanti |
"Duello poetico tra Anna Toscano (fotografa)
e Luisa Pianzola (poetessa milanese)".
Affiche de l'exposition photographique
inaugurée à Venise le 27 janvier 2005.
Anna Toscano lisant ses poèmes
durant le tournoi poétique du 27 janvier 2005
Ph.©LietoColle
BRÈVE ANTHOLOGIE
Guardami pure
« Guardami pure
così
labbra
imbronciate
a mettere distanza
tra noi
ma ti scorgo
poi
protesa a me
obliqua. » (Controsole, page 21)
Non cercarmi
«Non cercarmi
con gli occhi
quando mi fingo
disattenta
potrei trasalire
scoprendo di averli
per un attimo
dimenticati. » (Controsole, page 8)
Ne me cherche pas
« Ne me cherche pas
des yeux
quand je feins
d’être distraite
je pourrais tressaillir
si je découvrais les avoir
un instant
oubliés »
D.R. Traduction Angèle Paoli
Non ti arrovellare
« Non ti arrovellare.
Il tuo tempo è
scaduto da tempo. »(Controsole, page 26)
Nuovamente
« Nuovamente
ho sommerso
il tuo ricordo
sopra un altro
uomo. » (Controsole, page 27)
Toccami ancora
« Toccami ancora
uomo forte ed evanescente
sentimento di questo
mio tempo
desiderio impulsivo
vertigine che
non cade. » (Controsole, page 22)
Non dirmi
« Non dirmi
dove mi schianto
aria leggera contro il cielo
dimmi
cosa mi esplode
pietra infuocata nel cuore » (Controsole, page 15)
Ne me dis pas
« Ne me dis pas
où je me brise
air léger contre le ciel
dis-moi
ce qui en moi explose
pierre enflammée dans le cœur »
D.R. Traduction Angèle Paoli
La mia vita
« La mia vita finisce qui
sui gradini
afosi
della mia ombra » (Controsole, page 10)
Ma vie
« Ma vie prend fin ici
sur les marches
embrasées
de mon ombre »
D.R. Traduction Angèle Paoli
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En guise d'écho, un poème d'Attilio Bertolucci, poète qui a fait l'objet de la thèse d'Anna Toscano :
Le farfalle
«Perché le farfalle vanno sempre a due a due
e se una si perde entro il cespo violetto
delle settembrine l’altra non la lascia ma sta
sopra et vola confusa che pare si sbatta
contro i muri di un carcere mentre non è che questo
oro del giorno gia in via d’offuscarsi
alle cinque del pommeriggio avvicinandosi ottobre ?
- Forse credevi d’averla perduta ma eccola ancora
sospesa nell’aria riprendere l’irragionevole moto
[...]
tu non hai che a seguirla incontro alla notte
come l’attendesti nel lume inquieto del sole
finché fu sazia del succo di quei fiori d’autunno.»
Les papillons
«Pourquoi les papillons vont-ils toujours par deux
et si l'un se perd à l'intérieur du buisson violet
de giroflées, l'autre ne l'abandonne pas mais
vole au-dessus, affolé, et l'on dirait qu'il se heurte
aux murs d'une prison alors qu'il ne s'agit
que de l'or du jour déjà sur le point de s'assombrir
à cinq heures de l'après-midi, octobre s'approchant ?
- Peut-être croyais-tu l'avoir perdu, mais le voici de nouveau
suspendu dans l'air, qui reprend son mouvement irrésistible
[...]
tu n'as qu'à le suivre, au-devant de la nuit,
comme tu l'as attendu dans la lumière inquiète du soleil
jusqu'à ce qu' il fût rassasié du suc de ces fleurs d'automne»
Attilio Bertolucci, Voyage d'hiver, traduction de Muriel Gallot, Verdier, 1997, page 27.
Rédigé par : Florence Trocmé | 17 janvier 2005 à 17:58
Un autre poème extrait du Voyage d'hiver (Viaggio d'inverno), un poème dédié à Pier Paolo Pasolini et dit à voix haute par Attilio Bertolucci en personne : Piccola Ode a Roma [un document d'archives de la RAI].
Rédigé par : Yves | 09 juillet 2006 à 15:49
Sur vibrisse, une note d'Annalisa Bruni sur la poésie d'Anna Toscano.
Rédigé par : Yves | 19 novembre 2006 à 22:49
Ciao Anna !
Piacere di fare la sua conoscenza tramite il bellissimo blog di la sua amica Angèle Paoli. Se mi permeti, desiderei pubblicare un articolo su di lei, nel mio blog ...
Un caro saluto da Bordeaux!
Simbad
Rédigé par : Simbad | 17 février 2007 à 17:46
Quelle savoureuse découverte … Sens du mot décalé, de l'image qui touche, éraflant nos certitudes et comme narguant nos troubles. Dans le déploiement comme dans l'ellipse, Anna Toscano est brillante. Et même bien davantage que cela …
Rédigé par : Pascal Perrot aka Poetic Gladiator | 18 février 2007 à 00:10
J'ai suivi les indications d'un ami pour vous trouver en ces mots. Vos textes sont magnifiques. Beaucoup de plaisir à les lire.
A bientôt
Rédigé par : claude | 21 février 2007 à 09:32
Entre les pierres bordant le cours des canaux, çà et là des christe-marine.
Aujourd'hui Anna Toscano. On revient toujours à Venise. J'ai maintenant une raison de plus...
Grazie a lei per le sue poesie e a Angela.
Elle est loup de velours et ses pas
dynamitent Saint-Marc. Elle court
vers moi ses cheveux en vol comme un
éventail aiguisent mon regard
Je découvre sa très longue robe
pourpre prends place et cathédrale-
ment figé lance à lagune le re-
flet festonné d’un poème sus-
suré mais sûr de son carnevale.
JFA (sans doute quelque prémonition d'Anna Toscano)
Rédigé par : Jean-François AGOSTINI | 22 février 2007 à 14:18