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11 décembre 2004

Corse_3 La Corse est un cosmo-poème

Kenneth White, Corsica. L'Itinéraire des rives et des monts




Luri_1
Luri (Cap-Corse)
De Santa Severa à la Tour de Sénèque

Ph. angèlepaoli




Comme le souligne le nomade intellectuel Kenneth White, la Corse est une terre idéale pour les cheminements de la géopoétique. Car à elle seule, « la Corse est un cosmo-poème ». Il a d’ailleurs existé à Bastia une Accademia dei Vagabondi (fondée en 1651 par l'évêque génois Carlo Fabrizio Giustiniani [1656-1683], elle a été rétablie en novembre 1749 par le marquis de Cursay). Elle recrutait ses membres parmi ces « errants » et navigateurs qui partaient suivre leurs études à Pise, à Gênes ou à Padoue, ou, en bons descendants de Ghjacumu de Negroni (cet amiral qui en 1571 partit de Macinaggio pour combattre les Turcs à Lépante avec ses quatre felouques, la Capitana, la Padrona, la Bastarda et la Quarta) s’exilaient un temps aux Amériques.

Pour White, la Corse est « un petit morceau de la Terre, un microcosme ». Il y a rencontré Esprit Requien, le botaniste avignonnais, auteur d’un Catalogue des coquilles de la Corse (1848), James Boswell, l’ami d’un autre herboriste et promeneur solitaire, Jean-Jacques Rousseau, mais aussi de Pascal Paoli (« u babbu di a patria »). Boswell est aussi l’auteur d’un Account of Corsica. The Journal of a Tour to that Island (traduit et édité aux éditions du Rocher). White a aussi croisé le navigateur corse Dominique Cervoni, né et mort à Luri, et qui apprit la navigation à Joseph Conrad, mais encore le philosophe en exil Sénèque qui détestait les montagnes corses : « Barbara praeruptis inclusa est Corsica saxis/ Horrida desertis undique vasta locis » (lire la Lettre de Corse de Sénèque publiée en 1995 aux éditions San Benedetto d’Ajaccio).

Corsica, l’Itinéraire des rives et des monts est tout à la fois « nouvelle (éclatée), livre de voyage (radical), essai (extravagant) ou poème (du monde). » Un cheminement à conseiller à tous ceux qui veulent explorer dans leur propre vie les champs inédits du possible.

Kenneth White, Corsica. L'Itinéraire des rives et des monts, Editions San Benedetto - La Marge éditions, Ajaccio.


Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli




Corsica_white




EXTRAIT

« Pourquoi avais-je si envie d’aller à U Campu ? Eh bien, c’est ici qu’est né Dominique Cervoni, le marin corse que Joseph Conrad aimait tant et dont il parle dans Le Miroir de la mer. J’y suis finalement arrivé : un petit village plongé dans le silence et l’odeur de la fumée de bois. La maison de Cervoni n’a rien de remarquable. Mais elle porte cette plaque à sa mémoire :
Dans cette maison est né
le 28 août 1834
Dominique André Cervoni
navigateur et grand aventurier
Il y mourut le 27 juillet 1890
Pour Conrad, Cervoni était un « frère ». Ce qui ne voulait pas seulement dire qu’il faisait partie de la grande fraternité de la mer, mais qu’il était en quelque sorte un étranger (un isolato) au milieu de ses semblables, à tel point qu’il pouvait transcender leurs codes, même ceux qu’il respectait le plus, au nom de quelque chose d’autre, n’acceptant comme juge de ses faits et gestes secrets que le ciel vide et l’implacable océan. »
(page 92)


A peu de distance de ce hameau de Luri, qui a beaucoup marqué Kenneth White, trois îles aux oiseaux : la réserve naturelle des îles Finocchiarola (les îlots A Terra, Mazzana et Finocchiarola, au nord-est du Cap Corse, près de Macinaggio), principal site de nidification du goéland d'Audouin en Méditerranée.




Goland_daudouin
Ph.©Alain Fossé



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